02 novembre 2014 -
31 janvier 2015
Les estampes de Martin Werthmann ainsi que son installation «Sink» captivent par leurs paramètres uniques et en vertu du fait que ce sont souvent de très grandes formats. Ils plongent le spectateur dans des expériences parfois même physiques, lui offrent de nouvelles façons de voir, de vivre, et de penser le monde.
Martin Werthmann est un artiste Allemand né en 1982, qui crée principalement des estampes en très grands formats. Son travail est issu de la longue tradition Allemande de gravures sur bois qui débuta avec Albrecht Dürer, et fut reprise par les expressionnistes du groupe Die Brücke avant de réapparaître dans le travail d’artistes contemporains comme Anselm Kiefer ou Gerd et Uwe Tobias. Les impressions multicolores et multicouches de très grandes tailles de Martin Werthmann sont autant d’espaces d’expressions du caractère sémiotique de toute chose. Ce n’est pas par ce qu’elles recèlent un message caché qui aurait juste besoin d’être découvert que ces estampes surprennent le spectateur, mais par ce qu’elles ouvrent un espace de réflexion polymorphe que ce dernier concrétise dans un dialogue personnel avec l’œuvre d’art.
La séduction toute particulière que suscitent les œuvres de Martin Werthmann est le fruit de l’anachronisme de ses juxtapositions. On y retrouve des éléments ornementaux, souvent inspirés de reflets aquatiques, sur lesquels viennent se télescoper avec ironie des motifs végétaux, charnels, ou architecturaux, chargés émotionnellement au point d’entraîner une sensation d’attraction/répulsion tout à fait fascinante. Cette dynamique est renforcée par les couches successives. Le jeu de couleurs et la structure de la surface participent à l’expression narrative de l’œuvre. Les estampes de Martin Werthmann brisent le modèle établi de la représentation figurative et du discours lexical afin de déstabiliser le spectateur, l’obligeant à expérimenter le monde différemment.
Ce sentiment de déstabilisation et la possibilité d’une nouvelle expérience physique sont également très présents dans l’installation «Sink[1]» (2014; bois, caoutchouc, pompes; 400x600x600cm). Le spectateur est invité à monter dans le cœur d’un tourbillon géant qui brasse 17.000 litres par minute avec l’impression d’être à la fois invincible et sur le point d’être aspiré au cœur de la terre. Le titre quelque peu ironique contraste avec cette expérience existentielle, presque mythologique, qui dans des conditions naturelles serait certainement mortelle. Dans le même temps, cette installation représente la volonté des hommes de maîtriser les forces de la nature en reproduisant les sensations d’une expérience catastrophique tout en lui ôtant ses pouvoirs destructeurs.
Frederike Lagoni