20 février 2015 -
10 mai 2015

Double Décor

Éléonore False et Ana Vega

Double Décor

Tel un double décor, les œuvres en dialogue d’Eléonore False et Ana Vega composent, au sein de l’Hôtel de Gallifet, une suite de paysages et d’actions illusionnistes. Leur traitement matériel et volumétrique de l’image (collage, retouche, répétition, agrandissement) active un nouveau point de vue sur celle-ci, entre photographie et objet, motif en mouvement et geste corporel.

L’exposition double décor réunit pour la première fois ensemble une sélection d’œuvres d’Eléonore False et Ana Vega, en mobilisant la pluralité de leurs moyens d’expression. De la photographie au collage, du moulage à la vidéo, de la céramique à l’installation, ces différentes pièces agencées en correspondance au sein de l’Hôtel de Gallifet composent une suite de paysages et d’actions illusionnistes. 

Le dispositif global convie à un cheminement activant des jeux de points de vue et vise à établir un dialogue avec son lieu d’accueil. Cet écrin patrimonial offre en effet un espace architectural et un décor spécifique qui correspond parfaitement à deux principes essentiels qui guident la réflexion des deux artistes : la figure du dédoublement et la question du décor.

Leurs œuvres, rapprochées et confrontées selon un réseau d’affinités et d’échos, viennent en quelque sorte redoubler le décor original du site, non sans établir un renvoi aux tapisseries et autres éléments décoratifs qui l’ornaient autrefois. Dans le même temps, les références au corps, au geste et à la danse qui façonnent régulièrement leurs propositions renforcent l’aspect chorégraphique de l’exposition.

Cette méditation à deux voix sur la matérialité et la mise en forme de l’image recourt à différentes opérations de traitements et de manipulations, en passant du plan au volume, en se déployant du sol au mur, en convoquant reflets et mouvements, en utilisant la fragmentation, la coupe, le pliage ou la superposition, et en variant échelles, surfaces et couleurs. Il s’agit ainsi de mettre en évidence l’exploration partagée par Eléonore False et Ana Vega des potentialités volumétriques de l’image, phénomène qui se manifeste chez un nombre grandissant d’artistes de leur génération.

De cet assemblage de pièces émergent plusieurs points de rencontre de leurs démarches respectives, en particulier autour d’une appropriation commune de motifs et d’images qui sont ensuite retraitées par agrandissements ou fusionnées avec d’autres éléments. Si Eléonore False puise dans un vaste répertoire de sources iconographiques, parfois anciennes,  qu’elle retravaille manuellement dans un rapport contrasté entre noir et blanc, Ana Vega, quant à elle, se tourne vers les codes vivement colorés de l’univers publicitaire pour personnifier des objets courants à l’aide de l’outil numérique. L’une et l’autre parviennent à établir, au moyen d’un vocabulaire esthétique propre, une même tension singulière entre séduction visuelle et trouble de la perception du regard.

Leur rapprochement donne au final l’occasion de mesurer l’évolution et la cohérence de leurs parcours depuis leur formation menée en parallèle, initialement en arts appliqués du textile puis en école des Beaux-Arts. Un double enseignement qui a marqué de son empreinte leur intérêt équivalent pour les multiples dimensions du décor et ses interrelations avec les domaines de la peinture, de l’ornement, du théâtre ou encore du cinéma.

Commisaire : Alexandre Quoi