L'Eau, la Couleur, les Songes
Aussi loin qu’il se souvienne, Jean-Martin Barbut a toujours été un observateur émerveillé. C’est par ce point de vue sur le monde et ce qui le peuple qu’il s’est passionné pour les découvertes de la physique théorique, des dimensions relativistes d’Einstein et du monde quantique. Des prépas aux Grandes Écoles aux écoles d’art (après un passage en math sup bio et en fac de biologie, il a étudié la musique concrète au Conservatoire National de Région de Marseille et la photographie à l’Ecole Nationale Supérieure de Photographie d’Arles, il a été l’assistant du photographe Dennis Stock) en passant par l’exercice de diverses formes de méditation auxquelles il n’hésite pas à ajouter la pratique de sports nautiques (aviron, plongée libre, nage de traversée), il a laissé mûrir l’émerveillement qu’il ressent toujours dès qu’il parvient à se connecter à ce qui l’entoure.
De cet émerveillement, est né un « pourquoi », suivi d’un « comment », auxquels il a apporté une réponse très simple : la conscience. Plus la conscience s’affine, moins les frontières subsistent et plus les différences s’imbriquent. L’eau, qu’il pratique quotidiennement dans sa version salée, lui a semblé (comme une évidence) être le parfait support métaphorique de l’idée de conscience et de matière imbriquées. Une source de vie qui peut à son gré dévorer sa création. Un tout qui sait s’individualiser pour se refondre dans sa matrice, riche de l’expérience vécue. Son travail nous invite à penser autrement la photographie abstraite. Il ne s’agit plus de se demander « Qu’est-ce que c’est ?», mais plutôt « Qu’est-ce que je vois ? ».
Jean Martin Barbut utilise le flou photographique créé par les remous et l’impétuosité des flots comme illustration de la dimension quantique (probabiliste) de la matière. Au cours de longs moments de contemplation, il entreprend de capturer le souvenir qu’il aura de l’instant vécu.
Le photographe rend compte, dans L’oeil de Poséidon du mouvement des vagues lorsqu’elles s’entrechoquent. Le retour de Scylla III– les références à l’âge d’or de la Grèce antique sont importantes – évoque une peinture : son oeil s’est éduqué à l’image par la peinture. Ce travail peut se situer dans l’esprit des Equivalents d’Alfred Stieglitz, les marines de Gustave Legray, les Vagues de Courbet, La Grande Vague d’Hokusai, mais aussi les jaillissements d’énergie de Turner.
« L’oeuvre d’art nous apprend que nous n’avions pas vu ce que nous voyons » disait Paul.